samedi 28 juin 2008

Flashs nordiques


Elle s'appelait Liisi ou Leevi, j'sais plus moi je l'appelais Lily, une jeune barmaid d'Helsinki qui n'avait pas que le physique.
Ce soir de mai, je venais à peine de poser mes bagages en terre finlandaise. Fatigué. Quelque chose me gênait dans ma poche arrière droite, j'en pris connaissance. Un affreux flyer orangé, en finnois, sur lequel j'arrive à distinguer: "Club", "Happy Hours" et..."Metro Siilitie Igelkottsvägen".
Premier et dernier élément de ce rustre langage que j'assimilai avec difficultés.
Je déteste les boites de nuit, c'est le genre d'exception qui confirma la règle...

23h51, j'étais d'un côté du bar, Lily de l'autre, 4 glaçons à la mains. Non Lily n'était pas resplendissante de beauté, enfin pas encore, ce serait trop facile. Je demande maladroitement à boire à son collègue blond...un Ti Punch. Problème de communication évident, j'opte pour un mot plus universel en ces contrées septentrionales: vodka, please.
Le temps passe, la session 90's du Dj me lasse. Ennui nordique. 33 degrés sur la piste, mais j'ai froid.

Les basses crachent: "Because we are your friends, you'll never be alone again". Publicité mensongère, j'étais seul au monde dans cette immense foule difforme.

1h22, Dj Lempi se décide à passer
Jump! Jump! de Kriss Kross, même si je n'avais que 4 ans à l'époque du single, je savais de quoi il en retournai, j'esquisse un sourire. Lily jette ses glaçons par terre, attrape un T-shirt dans un carton, monte sur le bar, et enfile ce vêtement à l'envers comme le faisait les chanteurs du groupe en 92. J'éclate de rire comme jamais. Vraiment, comme jamais. Il semble que je sois le seul. Ah non, elle rit aussi. Elle à un nombre de dents hallucinant, si c'était possible, son sourire ferait le tour de son crane, j'en reste intimement persuadé.

4h24, Elle et Moi, association hétéroclite assemblée devant la porte de chez elle. Je me marre, parce que je n'arrive pas à déchiffrer son nom sur la boite aux lettres. Ce n'était pas drôle, mais elle ça la faisait rire. La finlandaise est bon public.
Au rez-de-chaussée, je me cogne dans un truc. Il n'y a pas d'autres mots pour décrire ce monticule de matière. Toujours est-il que Lily descendait pour moitié d'un père plasticien "dadaïste-surréaliste" et que l'homme en question avait laissé des traces de son existence sur Terre avant de mourir. Pour le meilleur, pour le PIRE.

5h01, sur son futon dur comme de la roche, elle est nue comme un ver mais a gardé ses escarpins rouges, sûrement un délire de scandinave. Je ne m'en plains pas, j'obtempère.

5h42, 2è round, on fait des trucs de cons, comme des enfants malpolis.

6h28, grognon, je la repousse, elle et ses préservatifs recyclables au cassis. Elle me chante:" heal the world, make it a better place". Je m'endors.


13h48, succulent breakfast devant son écran plat aussi large que le mur d'une chambre d'étudiant parisienne. Je peine à obtenir d'elle l'équivalent finlandais du Doliprane. Elle me raconte sa vie: la mort de son père, l'héritage familial, sa passion pour les chevaux, son échec dans un école d'art berlinoise, l'équipe féminine de volley au lycée, son frère urbaniste. Je ne bronche pas, mais me demande intérieurement quel âge a-t-elle avec ses faux airs de grande cruche; puis lui écris mon prénom en japonais sur l'avant bras à l'aide d'un rouges à lèves. Elle m'engueule parce que c'est un Dior, ou un Chanel, je ne sais plus. Je m'en fous.


14h01, scène d'émeutes en Birmanie sur notre "home cinema", les cris des victimes en Dolby Surround sont saisissants. Le sang, qualité HD, aussi écarlate que du vrai, sans colorants ni conservateurs. Mère "Lily" Teresa, invective son téléviseur innocent en finnois. Relents alter-mondialistes écolos. A parier que le film culte de son enfance était
l'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux. Elle m'exaspère. Se retourne vers moi, prend un pose de rappeuse U.S et un pseudo-accent jamcain et me balancent les paroles de Paper Planes de M.I.A: " Pirates, skulls and bones. Sticks and stones and weed and bombs. Running when we hit' em. Lethal poison through their system".

Elle a les larmes aux yeux. J'engouffre une énième tranche de bacon local.


C'est vraiment con ça, je suis incapable de me rappeler de son foutu prénom!