mercredi 18 février 2009

Engourdissement





J'étais prédestiné à la Lutte.

Seulement, le destin c'est une belle connerie.

Et pourtant, à peu près tout les éléments possibles étaient réunis pour qu'à 20 ans, je sois un glorieux meneur de grèves ou autre militant acharné parlant de Jean Jaurès avec des trémolos dans la voix.

Mais rien n'y a fait. Ni père, ni mère, pourtant de convaincus syndicalistes réfléchis (non ce n'est pas un oxymore!!). Ni ces manifestations effectuées depuis l'ère Juppé alors que je n'étais pas plus grand qu'une banderole. Ni cet oncle qui chantait l'Internationale fin décembre, alors que j'attendais encore qu'un type barbu fasse tomber une grosse GameBoy grise par la cheminée.

Non rien y fait. Ni même cette conscience politique qui a germé en moi depuis l'école primaire.
Oui je me rappelle ce 4 novembre 1995, jour où j'ai dû me mettre sur la pointe des pieds pour saisir le combiné de téléphone et appeler mon père, tout ceci pour lui annoncer la mort d'Ytzakh Rabin, "parce que je savais que c'était grave".
Oui j'ai vu les larmes de mes proches couler à la mort de St François Mitterand. Oui j'ai regardé avec un air médusé Claude Sérillon annoncer les premières frappes de l'OTAN au Kosovo, alors même que la France chantait encore
I Will Survive et que je me battais avec un Cordon Bleu dans mon assiette.
Oui j'ai toujours su que Sa
Lam Hussein et HiKler étaient plus méchants encore que Freezer ou Cell. Non je n'ai jamais été dyslexique.

En tout cas rien y fait. Même cet ultime effort. A mes 18 ans, au lieu de passer le permis, je m'encarte au PS. A moi les débats stériles du mardi soir, à moi les prospectus rouges dans la boite aux lettres, à moi le tutoiement forcé de gros messieurs en costard "qui ont fait l'Algérie mon p'tit gars".
J'étais doublement minoritaire dans ces réunions: je n'avais pas assisté en direct au premier pas de l'Homme sur la Lune, je n'avais pas besoin de crème solaire indice 50 quand j'allais à St Malo l'été.

Et puis, à moi la Pimbêche non désirée, à moi la désillusion politique, la Carte Sacrée, les ciseaux, la poubelle et les grognements.

L'ENGOURDISSEMENT.


Pas de fausses excuses, on peut TOUJOURS agir. Et moi je regardais, fruit d'une procrastination de chaque instant, je n'ai jamais joué aucun rôle politique. Et je regarde toujours.

Face au mouvements sociaux, j'adoptais le "ni pour, ni contre, bien au contraire". Il ne me restait plus qu'à voter Bayrou et la boucle était bouclée.
En réponse aux réprimandes de mes camarades marxistes, je répondais qu'il fallait réfléchir avant d'agir. Ça ne voulait rien dire. Doit-on avoir un Master en Sciences Politiques et Relations Internationales pour voter aux élections cantonales?

J'ai longtemps méprisé les utopistes. Je me suis tu, j'ai lu, j'ai perdu.
Mais je ne vaut pas mieux que ces Don Quichottes , eux au moins ils on un moulin à combattre. A quoi bon garder ses idées pour soi, a quoi bon être un vieux con de 20 ans?

Je suis un mou politique, flemme ou lâcheté, personne ne saurait le dire.

On devrait pendre haut et court ceux qui critiquent sans proposer, moi le premier.


J'ose une prédiction: notre génération va imploser sous le poids de la Procrastination Générale.