mardi 15 juillet 2008

Amenez-moi Freud sur le champ!...de bataille


Hier je suis allé au cinéma. En fait, un peu comme tout les jours étant donné que le cinéma est mon lieu de travail. Je consomme donc les films comme un boulanger consomme des pains au chocolat. Par réflexe, souvent pour passer le temps, pendant une pause, mais aussi parfois avec grand appétit.
Je préfère déguster que dévorer.
Les aliments qui laissent un goût amer sont parfois les meilleurs, il faut juste faire un tout petit effort. Prendre son temps.

Le petit effort qui consiste à troquer le fast-food pour de la Cuisine digne de ce nom. C'est un peu le même effort qui consiste à se rendre dans la salle d'art et essai plutôt que dans son habituel multiplexe (bien sûr à Paris on peut trouver de l'art et essai pas trop pointu dans les multiplexes, mais c'est une autre affaire en province.)


Il n'y a pas que Hancock qui détruit des bâtiments pour sauver le monde...malheureux dommages collatéraux. Dans la même catégorie, l'armée israélienne ainsi que le phalangistes chrétiens ont fait assez fort au Liban en 1982...


En allant voir
Valse avec Bachir, je m'attendant à une simple version israëlo-libanaise du délicieux Persépolis. Il n'en fût rien. Ari Folman n'a pas la malice Satrapi. On ne rit pas devant ce film d'animation.
L'histoire est celle d'un israélien, ancien vétéran du Liban, qui essaye de se rappeler de la campagne militaire à laquelle il a pris part 20 ans auparavant. Guerre que sa mémoire à occulté, modifié ou magnifié. Pour cela, Boaz s'entretient avec des psychiatres ou d'anciens vétérans qu'il aurait côtoyé durant la guerre, et rempli ainsi les cases manquantes de sa mémoire jusqu'au fatidique massacre de Sabra et Chatila.

Freud et son inconscient viennent donc au secours du soldat, de l'Histoire et de la Mémoire. Problématique que j'ai eu le plaisir de traiter maintes fois en Sciences Politiques...

On peut tous faire une parabole avec notre propre vie. Notre mémoire, nos souvenirs, constamment biaisés par notre inconscient. Notre 10è anniversaire était-il si joyeux? Notre premier baiser si succulent? Ce vaccin contre la tuberculose en primaire était-il si douloureux? Combien de disputes oubliées ou au contraire emphasées ? Est-ce que notre cher Boaz a vraiment été un héros pendant cette guerre? A-t-il participé au massacre de Sabra et Chatila? Je vous laisse le découvrir par vous-même.

Bien évidemment, les problèmes traités dans Valse avec Bachir sont plus dramatiques, il s'agit bien là de guerres, de territoires, religions, politiques et de violence.
Le film n'est pas juste une dénonciation d'un régime, d'un groupe d'hommes ou des massacre en eux-mêmes.
C'est tout d'abord le portrait d'israéliens un peu perdus, ne sachant pas trop ce qu'ils faisaient au Liban, se battant contre un vague ennemi comme lors de la plupart des guerres, donc contre tout le monde sauf eux-même; partant la fleur au fusil comme les jeunes français en 14. Un film israélien dans lequel les israéliens on le rôle des bourreaux, avec la culpabilité qui va avec, fait encore très rare six décennies après la Shoah.


Ce que je craignais dans ce genre de film quasi dépourvu d'humour, d'ironie et de cynisme: c'est de tomber dans la complainte pathétique. Enorme écueil que le réalisateur évite avec brio, malgré un ton très "premier degré" on ne tombe pas dans un pathos gluant et larmoyant. Le film reste digne et infiniment poétique, grâce à une qualité d'animation rarement vue. Le dessin rappelle Joann Sfar et son
Chat du rabin en plus chatoyant. Le Beyrouth de 1982, à feu et à sang devient la scène géante d'un spectacle de son et lumière, exercice pyrotechnique bien plus saisissant que ceux auxquels nous avons la joie de pouvoir assister en ces temps de fête nationale. Le tout agrémenter d'une B.O absolument décalée (sans doute la seule source d'humour du film) et de dialogues en hébreux, langue râpeuse qui chatouille l'oreille comme on effleure un bouton de moustique: ça gratte mais c'est agréable.

Même dans ce magnifique écrin, le film est cru, dur, beaucoup trop vrai,la pression monte au fur et à mesure jusqu'à une apothéose quasi-gênante.

Mes yeux restent rivés sur l'écran tout le temps du générique sans que ma paupière inférieure disent bonjour à sa voisine du haut. Mes membres semblent vouloir rester solidaires à ce moelleux fauteuil. Ma tête est à Beyrouth.


J'avais dit que je ne me ferais jamais avoir par un film sur la guerre, c'est trop pathétique. Mais Ari Folman à réussi là où De Palma à échoué avec son
Redacted passé inaperçu il y a quelques mois. J'étais bluffé.

Je sors de la salle, l'air hagard, agressé par la blanche lumière du jour. Seul dans un rue pavée un dimanche après-midi. Je suis soudainement surpris par la répétition d'un rythme dans un rue voisine "1,2,1,2,1,2!". Et me voici nez-à-nez avec avec des centaines de types costumés et armés jusqu'aux dents. A Rennes, le défilé à lieu le 13 juillet, j'avais oublié...
Des pères de familles robustes tiennent des enfant sur leurs larges épaules, chers petites têtes blondes qui tiennent de jolis petits pulls marine noués sur leurs frêles petites épaules, agitant un drapeau français miniature à la main, célébrant des machines de guerre. "Papa, tu crois que monsieur là, il a déjà tué une autre monsieur avec son fusil?".

On applaudit. On rit. C'est la fête. Une fête NATIONALE! BOOM, BOOM, PAN, PAN!! BRAVOOOO.
Oh la belle rouge!

3 commentaires:

D. a dit…

Tu parles vraiment très bien de cinéma, dommage que tu le fasses rarement ici.
Les films d'animation quelque soit le thème moi ça m'endors.
Persepolis j'ai aimé sans plus mais j'ai quand même à certins moment lutté.
Pourtant la façon dont tu parles de celui-ci me donne envie.
Je me laisserai peu etre téntée.
C'est vrai que le dernier De Palma, je n'en ai presque pas entendu parlé, voir jamais, ou ma mémoire me fait défaut je ne sais plus.
Sinon où en est tu de tes lectures de l'été, et les vacances?

Paya a dit…

C'est vrai que j'ai un peu plus de mal à parler de cinéma depuis que j'y travail. Depuis que cet univers est démystifié et que je vois énormément de films.
Après je comprends que tu puisses avoir du mal avec les films d'animations, j'en connais d'autres comme toi.
Tu me diras ce que t'en penses si t'es allé voir Valse avec Bachir.
Le de Palma est passé inaperçu, je pense qu'il devait y avoir quelques dizaines de copies en France. Ça parle des exactions des GI's américains en Irak (viols ect), et c'est basé sur des vidéos de YouTube reconstituées par De Palma, c'est assez spécial, et un peu chiant.

Quant à mes lectures estivales, j'en suis toujours à Lolita, que je savoure, mais j'ai pas forcément le temps d'avaler les 500 pages.
Et puis sinon mon été va sans doute consister à alterner le boulot avec des escapades parisiennes, bretonnes, basques, espagnoles, hollandaises ou autres. Au jour le jour.

J'espère que t'as apprécié Berlin et puis Jill Scott.

Anonyme a dit…

aloooors? je suis sure que je ne te dois rien! en tout cas si tu aimes Prince...je suis sure que je te dois rien.
et sorry si j'ai pas répondu avant, je passais en coup de vent sur blogspot.